Araucaria. Revista Iberoamericana de Filosofía, Política y Humanidades | Sección digital
Sección digital Otras reseñas Mayo de 2008
Bernard Bailyn, Atlantic History. Concept and Contours [*]
Harvard University Press, 2005, 149 pp.
Federica Morelli
Bernard Bailyn, l’un des plus célèbres historiens de l’Amérique coloniale, trace dans ce livre un panorama éloquent et concis de sa vision de l’« Atlantic history ». En effet, il est l’une des plus grandes figures du nouveau courant historiographique qui se développe depuis une vingtaine d’années, principalement aux Etats-Unis, et repose sur l’idée que le monde atlantique constitue une unité d’analyse, un vaste espace unitaire et intégré, au sein duquel doivent être étudiées les relations entre l’Europe, l’Afrique et les Amériques, entre le début du XVe et le milieu du XIXe siècle, dans une perspective transnationale ou comparative. Après avoir organisé et dirigé une série de séminaires sur l’histoire atlantique à l’université de Harvard, il a décidé de se consacrer à l’analyse des dimensions aussi bien historiographiques qu’historiques de cette discipline, aboutissant à la rédaction de cet essai particulièrement riche et stimulant, fruit de plusieurs années de réflexion.
Dans la première partie, « The Idea of Atlantic History », Bailyn envisage l’histoire atlantique comme un objet d’enquête historique. Le concept, nous dit-il, remonte à l’époque des deux guerres mondiales et a été élaboré parmi ceux qui, aux Etats-Unis, souhaitaient une intervention aux côtés des alliés ; les mêmes qui, dans l’après-guerre, aspirèrent à entamer une collaboration politique et stratégique avec les pays de l’Europe occidentale. Au cours des années soixante, certaines institutions politiques, telles que le Conseil Atlantique des Etats Unis et sa publication journalistique baptisée The Atlantic Community Quarterly, ont contribué à l’affirmation définitive de l’idée de « communauté atlantique », considérée comme un sujet historique et inévitable. Mais les historiens nord-américains ne sont pas les seuls à avoir participé à l’élaboration de ce concept, comme le montre Bailyn en soulignant le rôle joué par l’historiographie française et notamment l’importance des apports de Jacques Godechot -qui, avec Robert Palmer, a ouvert le chemin des « révolutions atlantiques »- et de Pierre et Huguette Chaunu, dans le domaine de l’histoire économique atlantique. L’auteur aborde ensuite des sujets qui, depuis les années soixante-dix, ont donné une nouvelle dimension aux études atlantiques : les recherches démographiques sur l’esclavage, les migrations et les populations indiennes, ainsi que les études sur le commerce et enfin l’histoire intellectuelle.
Dans la seconde partie « On the Contours of Atlantic History », Bailyn essaie de définir les contours de ce nouveau courant. En premier lieu, l’histoire atlantique ne peut pas être réduite à la combinaison des différentes histoires nationales et à leur extension outremer, car cet espace, aussi bien espagnol que britannique, africain, américain, portugais ou encore hollandais, est en réalité bien plus que la somme de ses parties. Dans un second lieu, il nous dit que cette unité ne doit pas être envisagée dans des structures formelles, car il s’agit d’un monde en mouvement qui doit être plutôt étudié à travers des dynamiques de changement et de développement. Cette perspective permet à l’historien de reconstruire des processus qui concernent à la fois l’Europe, l’Amérique et l’Afrique en restituant à chacun son rôle d’acteur de l’histoire ; avec l’idée sous-jacente que que la rencontre des deux mondes a donné lieu à un processus continu de transformation de tous par tous et que dans la construction de l’espace atlantique les effets en retour sont aussi importants que les effets des chocs et des rencontres. En suivant cette ligne conductrice, Bailyn reconstitue trois grandes phases de l’histoire atlantique, qui ne correspondent pas à une chronologie précise : une première phase qu’il appelle de création d’une nouvelle vaste frontière de la civilisation européenne, caractérisée par la violence et la barbarie ; une phase de développement et d’intégration ;et enfin une phase caractérisée par la diffusion des idées politiques modernes et les révolutions d’indépendance.
La lecture de cet essai et des ses notes – le livre ne disposant malheureusement pas d’une bibliographie- nous montre à quel point l’histoire atlantique est une discipline non seulement développée principalement par des historiens anglo-saxons, mais aussi une histoire qui porte essentiellement sur le « British Atlantic ». Ce fait est le résultat de deux facteurs : d’un coté la difficulté de l’historiographie de plusieurs pays européens à accepter une perspective atlantique ; de l’autre, l’attitude de la majorité des historiens anglo-saxons, qui ne prennent pas en considération les résultats des recherches concernant les autres espaces, notamment les Amériques ibériques. Surtout, dans le livre de Bailyn, on n’y retrouve presque aucune référence à l’historiographie tant portugaise que brésilienne sur les études Atlantiques, qui pourtant est assez développée. Il n’en reste pas moins que ce livre a eu le grand mérite de dresser un premier bilan important sur l’histoire atlantique, sur ses origines et son évolution, et tout en montrant les formidables moyens méthodologiques que cet objet d’analyse peut offrir aux historiens de l’époque moderne.
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[*] Reseña publicada en la revista Nuevo Mundo. Mundos Nuevos.